-"J'aime pas."
Quel parent n'a jamais entendu cette phrase. Alors que bébé se montrait coopératif jusque là, se délectant de purées de courgettes et même de brocolis (si,si !) Voilà qu'à présent, il refuse d'avaler quoique ce soit... A part le dessert, les bonbons, ou le pain. Avouez que c'est déjà pas mal. Mais voilà, nous, adultes, avons la lourde tâche (pour ne pas dire la responsabilité) d'inculquer à nos chérubins la notion du sacro-saint équilibre alimentaire... On nous le rappelle à longueur de temps à grand renfort de campagnes sur l'obésité infantile et d'injonctions publicitaires "Mangez 5 fruits et légumes par jour..." Euh, les fraises Tagada, ça compte ?
Je t'aime, donc je mange
Et il faut bien le reconnaitre, s'entendre dire "j’aime pas", quand on s'est appliqué à faire la cuisine, c'est assez désagréable. Enfin, surtout pour nous, les filles, et en particulier pour nous, les mamans...
Pourquoi ? Et bien parce que nourrir les enfants, on aura beau dire tout ce qu'on voudra, c'est NOTRE créneau. Nous avons nourri ce bébé à peine né avec notre lait, nous sommes appliquées à nous reposer, manger du fenouil et boire de la bière (sans alcool, normalement, hein...) afin que notre corps produise suffisamment de ce nectar blanc si précieux pour notre petit si fragile. Si cette étape s'est passée sans encombre, nous voudrions tout naturellement que petit d'homme se régale de notre purée de céleri avec le même enthousiasme. Si l'allaitement ne s'est pas bien passé, nous pouvons être tentée de rattraper ce que nous avons peut-être vécu comme un échec et nous appliquer à mitonner des petits plats, spécial palais délicat, dignes de 5 étoiles au guide Michelin des moins de 5 ans. Et même sans parler d'allaitement, dans un pays où les femmes assument encore 80 % des tâches ménagères, ce sont bien souvent elles qui préparent les repas.
Alors quand à peine servi, petit d'homme rechigne, fait la moue, recrache, voire refuse tout net d'ouvrir la bouche, sans vouloir faire de jeu de mot, c'est un peu dur à avaler... Et alors quand il nous sert un "j'aime pas", avant même d'avoir goûté, on peut comprendre que pour nous, ce soit la fin des haricots...
Cet enfant ne mange rien !
Comme par hasard, ce manque d'entrain pour la nourriture survient en même temps que la fameuse période redoutée de bien des parents, appelée souvent "petite adolescence", mais mieux connue sous le nom de crise d'opposition. Vous savez ? Cette période où l'enfant n'écoute rien, dit "non" toutes les cinq minutes (et encore, je suis large...) et se roule par terre à la moindre contrariété... Cette étape cruciale du développement d'enfant met la pateience de bon nombre de parents à rude épreuve.. Et quand l'enfant s'oppose à la nourriture, c'est une occasion de plus de se battre... ou pas. Nous pouvons en effet choisir de porter un autre regard sur ce qui se passe autour de l'assiette de notre enfant.
Pourquoi il refuse de manger ?
Cette phase d"opposition est en réalité, une phase d'affirmation de soi. On pense souvent que l'enfant teste nos limites, mais en réalité, c'est plutôt des siennes qu'il s'agit ici. A cette période, l'enfant apprend à se connaitre. Alors que jusqu'ici, il avalait à peu près tout (y compris le gravier du parc et les croquettes du chat), il commence maintenant à explorer sa nourriture et à affiner son goût. Or, le goût s'éduque. Des études ont montré que le goût sucré est naturellement apprécié par les bébés nouveaux nés. D'où l'attirance naturelle des petits pour les desserts et les bonbons. Et ça tombe bien, parce que le lait maternel est sucré. Et il est indispensable à la survie des nouveaux nés. Comme quoi, la nature est bien faite.
Mais pour les autres saveurs, c'est une autre histoire. Les papilles gustatives situées sur la langue sont reliées à des récepteurs qui transmettent l'information au cerveau de l'enfant et provoquent une réaction. Mais tout ceci est en construction chez le petit. On sait aujourd'hui que lorsque le petit découvre une nouvelle saveur, il devra la goûter entre 8 et 12 fois (pas pendant le même repas, hien...) avant que son cerveau commence à l'apprécier. Et que certains coloris d'aliments provoquent le dégout. Nos ancêtres les hommes préhistoriques rejetaient certaines baies de couleur car elles étaient toxiques. Nous avons donc appris à nous méfier des aliments de cette couleur, et à les rejeter...
Mais alors, comment faire pour qu'il mange ?
Autant vous le dire tout de suite, il est impossible de faire manger un enfant qui ne mange pas. Pourquoi ? Parce que ce n'est surement pas en le forçant qu'on va lui ouvrir l'appétit. On peut agir sur ce qu'il mange, pas sur la quantité de ce qu'il mange. Les petits savent pour la plupart très bien réguler leur appétit. Tout petit, ils tètent leur mère jusqu'à satiété et s'autorisent à ne pas finir leur biberon quand ils en ont assez. Et nous n'en faisons pas un drame.... Pourquoi en serait-il autrement pour les petits pois et les haricots verts ?
Il est primordial de respecter l'appétit des enfants en leur servant de petites quantités, voire de les laisser se servir eux mêmes quand cela est possible. Et de les autoriser à laisser s'ils ont eu "les yeux plus gros que le ventre", comme disait ma grand-mère. On peut assez facilement accommoder les restes ou les conserver le cas échéant...
On peut néanmoins décider de poser une règle comme "on mange de tout un petit peu..." (qui vient aussi de ma grand-mère, comme quoi !) qui consiste à indiquer à l'enfant qu'il aura "pareil" de dessert que ce qu'il a mangé de légumes par exemple... Mais c'est une suggestion. A vous de tester différentes choses et de partager vos astuces en commentaire de cet article...
Tu n'aimes pas ? Mais pourquoi ?
Quand notre petit nous assène un "j'aime pas", devant notre plat préparé avec amour, nous sommes alors tentés de lui dire :
"Mais si, c'est bon, vas-y, goûte !"
Pour vous tenter de vous faire comprendre ce que votre petit ressent à ce moment là, prenons un autre contexte. Imaginons que nous soyez dans une boutique de vêtements. Vous avez vu un beau pantalon qui vous a plu quand il était exposé sur le mannequin en plastique sans tête d'1 mètre 75 et de 50 kg. Donc, vous avez eu envie de l'essayer. Et une fois sur vous, ce pantalon, vous ne savez pas pourquoi, mais il ne vous plait pas. Et la, la vendeuse s'écrie :
"Ma chérie, vous êtes magnifiiique !" (toute ressemblance avec une personne existante serait purement fortuite)
- "Euh, vous êtes sûre ?, j'ai pourtant l'impression qu'il me serre. Et la couleur, je ne suis pas sûre"
-"Si si , je vous assure, il vous va trrrrrès bien !"
Est-ce que la vendeuse, en insistant, arrive à vous convaincre que ce pantalon vous va comme un gant, alors que vous êtes sceptique ? Je suis prête à parier que non. En réalité, ce qu'on ressent à ce moment là, c'est que la vendeuse a vraiment envie de nous vendre sa camelote. Même si on l'air d'un sac.
Et bien pour l'enfant qui dit "j'aime pas, c'est pas bon", c'est pareil. Plus vous allez insister, moins il mangera. Mais comme vous êtes plus maligne que lui, il ne s'agit pas non plus de renoncer....
Plutôt que d'essayer de le convaincre que "si, si, c'est bon ", essayez plutôt d'accompagner votre petit à la découverte de son goût. Dites lui plutôt que vous avez besoin de lui pour comprendre ce qu'il n'aime pas. Qu'est-ce qui ne lui plait pas. La couleur ? L'odeur ? Proposez lui de goûter et de vous dire ce que ça fait dans sa bouche. Est-ce que ça pique ? Est-ce que c'est dur ? Mou ? Est-ce que c'est difficile à avaler ?
Tous ces éléments vous aideront à varier la présentation de vos plats à laquelle les petits sont sensibles. Vous pourriez également proposer le même aliment sous différentes textures, car certains enfants peuvent avoir des difficultés avec les morceaux ( des courgettes à l'eau peuvent très bien sembler répugnantes et s'avérer très appétissantes en gratin ou en purée)...
Plutôt que de voir cela comme une contrainte, profitez en pour laisser parler votre créativité, faire preuve d'imagination, et de patience....
Sur ce, bon appétit !
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